Le déchet dans le passé, témoignages recueillis dans la province de Liège
Monsieur
Henri, né en 1935, a vécu sa jeunesse en ville.
«
Quand j’étais jeune, les poubelles existaient déjà. C’était des poubelles
métalliques. On y mettait essentiellement des déchets ménagers. C’étaient les ménagères
qui s’occupaient des poubelles. Les camions emportaient le contenu et le
jetaient dans des remblais.
Les vêtements qu’on ne portait
plus étaient donnés au Cercle Paroissial, les emballages étaient
brûlés dans le foyer mais il n’y en avait pas beaucoup. Les savons étaient
solides même pour la lessive, on n’avait pas besoin d’emballage. »
Madame
Maria, née en 1929, a vécu sa jeunesse à la campagne dans une ferme.
« On
mettait tout à point ! Les restes des repas, on les donnait aux chats et
aux cochons. Les épluchures de pommes de terre et celles des autres légumes, on
les jetait sur le fumier. On jetait le
contenu des toilettes dans la fosse à fumier. Le papier toilette était du
papier journal puis quand on a eu le téléphone, c’était des feuilles de
l’annuaire téléphonique.
Pour
les vêtements, on récupérait tout. Hors de deux robes, on en faisait une avec
par exemple le dessus fleuri et le dessous uni. On réparait les chaussettes.
Avec un drap de lit, un couvre lit, une petite robe, on faisait des mouchoirs. Les
tissus des mouchoirs actuels sont moins absorbants.
J’ai même
eu un tablier double face pour aller à l’école, avec une poche à l’endroit et
une poche à l’envers. »
Madame
Joséphine, née en 1925, a vécu sa jeunesse à la campagne dans une ferme.
« On réutilisait tout. Comme
on ne mettait pas de détergent dans l’eau de vaisselle alors on pouvait la
donner aux cochons qui mangeaient aussi tous les restes de la cuisine.
On faisait du fromage et les
voisins venaient en acheter. Ils apportaient eux-mêmes leurs boîtes et leur
cruche pour le lait. Pour la viande, on tuait de temps en temps, un cochon et
on le préparait entièrement. Comme on n’avait pas de congélateur, on le mettait
dans le sel dans des pots en grès, dans la cave. A la ferme, on n’avait pas l’eau alimentaire,
mais il y avait des puits dans toutes les fermes. On puisait l’eau puis on
l’entreposait dans la cave. Pour se laver, pour la lessive, on utilisait l’eau
de pluie. »
Madame
Simone, née en 1927, a vécu sa jeunesse à la campagne.
« Il me semble qu’on n’avait
pas de poubelles ou en tout cas pas beaucoup. Les épluchures des pommes de
terre, on les jetait dans le feu. Au
magasin, tout était à peser, on achetait des grains de café qu’on nous mettait
dans un sachet ou dans une boîte et on devait les moudre à la maison, le sucre
était dans des boîtes en carton. Je me souviens de ma grand-mère qui était
épicière : on venait chez elle avec des bouteilles qu’on remplissait de
vinaigre, d’huile, …. Je crois que toutes les bouteilles étaient consignées. On
nous les mettait puis on les rendait. Il n’y avait pas de nourriture déjà
emballée. On achetait le lait, le beurre, les œufs et le fromage à la
ferme. »
Madame
Jeanne, née en 1923, a vécu sa jeunesse dans une petite ville.
« Il y avait beaucoup de
métiers qui n’existent plus. Un rémouleur passait deux ou trois fois par année
pour aiguiser les couteaux, le laitier déposait des bouteilles de lait en verre
puis qui les reprenait la semaine suivante. Je me souviens d’un fermier qui
venait chaque semaine à vélo nous vendre ses œufs. Mon père racontait qu’il
avait connu un vendeur de lait qui faisait sa tournée avec une carriole tirée
par un grand chien. Quand j’étais jeune, on n’avait ni téléphone, ni radio, ni
télévision. C’était une autre vie (…) mais je ne rappelle pas qu’on avait des
poubelles. »
Madame
Marie, née en 1930, couturière, a vécu toute sa vie à la campagne.
« On peut dire que pour
s’habiller, on a toujours recyclé. On retournait les cols de chemise quand ils
étaient usés. C’était devenu tellement naturel que même ma fille le fait encore
pour les chemises de son mari, quand elle aime bien le tissu. On recoupait les
manches usées, on rapiéçait les vêtements, la literie, on raccommodait les
chaussettes trouées. On ne jetait rien. On récupérait les bouts de tissus, de
lainage, … pour faire des flocons pour rembourrer les coussins ou les matelas.
Comme les tissus étaient en coton, on utilisait aussi les restes pour en faire
des mouchoirs qu’on brodait à nos initiales. Quand un pull était trop petit ou
troué et qu’on ne savait pas le réparer, on le détricotait et on réutilisait la
laine pour un nouveau tricot. Pour
avoir un fil plus épais et plus solide, on utilisait deux fils ensemble.»